Dans les directions juridiques, la donnée est devenue un élément essentiel pour piloter efficacement l’organisation et démontrer sa valeur stratégique. Pourtant, cette fonction reste souvent à la traîne sur ce sujet, souffrant d’un paradoxe : alors que les services juridiques se transforment et s’internalisent de plus en plus, leur maîtrise de la donnée et de l’IA demeure limitée. Cet article explore comment les directions juridiques peuvent tirer parti des données et des outils d’IA pour optimiser leurs opérations, mieux démontrer leur retour sur investissement (ROI), et atteindre une meilleure performance opérationnelle.
Dans une organisation, la gestion des données est le pilier de toute stratégie de transformation. Deux approches coexistent : l’empirisme, basé sur les intuitions et l’expérience, et la gestion éclairée par des données fiables. Seule cette dernière permet de démontrer un ROI clair, de planifier des projets en phase avec les objectifs de l’entreprise et de prioriser les actions.
Les directions juridiques doivent exploiter des données fiables pour identifier les sujets prioritaires, valoriser leurs enjeux et fixer des objectifs réalistes. En complément, l’IA joue un rôle clé pour structurer, analyser et exploiter ces données de manière automatique. Elle rend les informations plus accessibles et permet d’obtenir une vue d’ensemble essentielle, facilitant ainsi la prise de décisions éclairées.
Les effectifs des directions juridiques françaises ont augmenté ces dernières années, faisant de cette fonction l’une des plus en expansion parmi les fonctions support. Ce phénomène marque une tendance à l'internalisation des compétences juridiques, une pratique auparavant dominée par l’externalisation. Toutefois, cette fonction reste très hétérogène selon les entreprises, avec des disparités dans la maturité de gestion des données. Les organisations ayant misé sur des technologies de données et d’IA bénéficient d’un cercle vertueux d’optimisation de la performance et des coûts.
L’IA devient ici un outil stratégique pour identifier des modèles et des insights dans les données existantes. Par exemple, elle peut analyser des dossiers pour révéler des tendances dans les litiges ou les coûts, aidant les équipes juridiques à identifier des zones d’optimisation. Ainsi, les données associées à des solutions d’IA offrent aux directions juridiques un levier de transformation puissant pour moderniser leur fonction et mieux répondre aux exigences des autres services de l’entreprise.
L’exploitation de la donnée commence par son accessibilité. Or, pour de nombreuses directions juridiques, cette étape reste ardue en raison du manque d’outils de gestion adaptés. L’IA, en transformant des ensembles de données brutes en informations compréhensibles et exploitables, simplifie cette tâche. Avec l’IA, les directions juridiques peuvent extraire, classer et centraliser automatiquement des informations, facilitant l’accès aux documents nécessaires.
Par exemple, les technologies de reconnaissance automatique de texte et de traitement du langage naturel (NLP) permettent de transformer des documents en informations analysables, réduisant ainsi la perte de temps dans la recherche d’informations. L’IA permet donc d’automatiser la première étape, de manière à permettre aux équipes de se concentrer sur des analyses stratégiques.
Dans les organisations françaises, où de nombreux dirigeants sont d’anciens responsables financiers, la capacité des directions juridiques à démontrer leur utilité repose souvent sur leur capacité à fournir des données chiffrées. L’IA, combinée à la donnée, devient alors un outil clé pour aider les services juridiques à démontrer leur ROI, en mesurant par exemple leur impact en termes de coûts évités, de temps économisé et d’efficacité opérationnelle.
L’IA permet de générer des tableaux de bord automatisés pour suivre des indicateurs clés, comme les dépenses juridiques, les délais de traitement ou le taux de conformité. Grâce à des algorithmes de machine learning, les directions juridiques peuvent également prédire les coûts futurs ou identifier les risques potentiels, ce qui contribue à justifier des budgets et à prouver la valeur ajoutée de la fonction juridique. Pour plus de détails sur la mesure de la performance avec l'IA, consultez notre article sur l'IA et l'accès à la justice.
L'utilisation des données et de l'IA permet aux directions juridiques d'identifier des actions rapides et à faible coût, appelées quick wins. En priorisant les projets qui offrent des résultats rapides, les services juridiques peuvent démontrer leur impact sans nécessiter de gros budgets initiaux. Ces premiers succès facilitent ensuite les demandes de ressources et de financements supplémentaires.
Par exemple, l’IA peut identifier des processus répétitifs qui peuvent être automatisés à faible coût, réduisant ainsi la charge de travail des équipes et améliorant l’efficacité opérationnelle. Ces résultats rapides démontrent la valeur de l’approche basée sur les données et justifient des investissements futurs.
Une difficulté majeure pour les directions juridiques est le suivi des dépenses, notamment les coûts liés aux avocats externes. De nombreuses entreprises manquent de données précises sur ces coûts, ce qui limite leur capacité à optimiser ces dépenses. De même, peu de directions juridiques ont une vision globale de leurs contrats en cours, ce qui peut poser des risques de non-conformité ou de dépassement de budget.
Avec l’IA, les directions juridiques peuvent automatiser le suivi des contrats et des dépenses. Les outils d’IA peuvent détecter les contrats expirés, les clauses à risque, et même calculer les frais juridiques en temps réel. En s’appuyant sur cette analyse, les équipes peuvent optimiser les coûts et garantir une meilleure conformité. Pour en savoir plus, lisez notre article sur les biais et prompts en IA.
Les directions juridiques anglo-saxonnes sont en avance sur l’utilisation de la donnée et de l’IA, en partie grâce à une culture d'entreprise plus orientée sur les chiffres et la mesure de performance. Dans ces pays, les legal ops sont implantés depuis des années, offrant un support structuré pour optimiser les opérations juridiques et démontrer leur valeur.
En comparaison, la France accuse un certain retard. Toutefois, ce décalage représente une opportunité pour les directions juridiques françaises de tirer parti des succès anglo-saxons en adaptant ces pratiques. Les données et l’IA, en tant que piliers, faciliteraient cette transition vers une fonction juridique modernisée et plus efficace.
L’utilisation des données et de l’IA par les directions juridiques est devenue incontournable pour transformer cette fonction et démontrer son rôle stratégique. En exploitant pleinement les données et en intégrant des solutions d’IA, les services juridiques peuvent améliorer leur performance, optimiser leurs coûts, et renforcer leur crédibilité auprès de la direction générale.
Les directions juridiques ne doivent pas attendre quinze ans pour adopter ces technologies et devenir des acteurs de la transformation digitale. En valorisant les données existantes et en adoptant une approche progressive avec des quick wins, elles peuvent rapidement démontrer leur valeur et justifier des investissements supplémentaires. Pour en savoir plus sur les bénéfices de l'IA dans la recherche juridique, lisez notre article sur la recherche sémantique dans le juridique.